Mali: A la découverte des dogons, le peuple le plus énigmatique de l’Afrique de l’ouest.(Partie 2)

  • Par Saidi Mamadou Ouedraogo
  • 08 Janv. 2020
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La société dogon est patrilinéaire, mais la famille maternelle l'emporte sur les enfants. En effet, tout Dogon de retour au pays doit obligatoirement passer dans sa famille maternelle avant de rendre visite à ses parents paternels.


Les descendants d’un ancêtre commun font partie d’une ginna (grande famille) qui regroupe tous les adultes hommes, leurs femmes et leurs enfants. La ginna inclut également les maisons de famille et les champs leur appartenant. Le chef, le ginna bana (chef de la grande famille), est l’homme le plus âgé.

Les forgerons sont endogames. Les hossobé sont les bannis, les impurs. Deviennent hossobé tous ceux qui ont trahi leur clan d'appartenance. Les jeunes gens se retrouvent dans les classes d'âge, chaque classe construisant sa maison toguna. Ils s'y retrouvent, le plus souvent la nuit, pour pratiquer leurs rites ou encore des festivités.

Le hogon est le chef religieux du village dogon. Il est le prêtre du culte du lébé (Lébé Seru est le premier ancêtre dogon qui, enterré au pays Mandé, ressuscita sous forme d’un renard). Chef spirituel du village, il est élu parmi les hommes les plus âgés des familles du village.

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Après son élection, il doit suivre six mois de réclusion, pendant lesquels il ne lui est permis ni de se raser ni de se laver. Il porte des vêtements blancs et personne n'est autorisé à le toucher. Ses repas, préparés par des jeunes filles impubères, lui sont apportés dans des coupes particulières, les ogo banya. Il reçoit ces coupes de son prédécesseur ou au cours de sa cérémonie d'intronisation.

Après son initiation, il portera un bonnet rouge. Il a un brassard avec un coquillage sacré qui symbolise sa fonction. Le Hogon doit vivre seul dans sa maison. Les Dogon croient que le serpent sacré Lébé vient pendant la nuit pour purifier le hogon et lui communiquer la sagesse. Certains interdits lui sont prescrits. Il n’a plus le droit d’avoir un contact physique avec personne, il ne doit plus sortir de sa maison.

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Rituel dogon

Les cérémonies du Sigui sont un important rituel de régénération. Elles commémorent la révélation de la parole orale aux hommes, ainsi que la mort et les funérailles du premier hogon.

La société Awa (société des masques) dirige les danses masquées organisées lors des différentes cérémonies. La société comprend tous les hommes. Les garçons y entrent après la circoncision. Les femmes ne sont pas admises dans cette société, sauf celles nées l'année du Sigui.

La fête du Sigui a lieu tous les 60 ans. Comme la semaine dogon dure cinq jours, cela correspond à peu près à un siècle dogon. Lors des préparatifs, les initiés partent en brousse apprendre avec leurs aînés la langue secrète, le sigi-so et le rituel des masques.

Lorsqu'ils sont de retour au village, la fête les accueille pendant une semaine : les habitants revêtent des habits brodés de coquillages (cauris) qu'ils ne porteront plus et qui seront brûlés dans une grotte sacrée après la fête.

La semaine de fête terminée, c'est au tour du village suivant d'accueillir les danseurs et les nouveaux initiés et ainsi de suite tout au long de la falaise. Comme il faut bien s'arrêter pendant la saison des pluies pour les travaux des champs, la fête du Sigui dure près de 7 ans.

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C'est dans les villages des 3 Youga que commence la fête. On dit que les femmes nées pendant la fête sont les seules qui ont le privilège d'assister aux danses des masques.

Aujourd’hui Deux dogon sur Trois sont musulmans. La religion chrétienne est aussi pratiquée par ce peuple. Les dogons n’ont pas pour autant  délaissé leur religion traditionnelle.

La pratique de la table du renard

La "table du renard" sert d'instrument de divination. L’individu qui a des préoccupations va trouver le "devin" pour qu'il lui prédise l'avenir ou lui donne quelques conseils. À l'écart du village, le devin, à la suite des explications du client, trace un grand rectangle divisé en plusieurs cases, dont chacune reçoit différents signes et petits bâtons plantés dans le sol. Ensuite, le devin demande au client de lancer sur cette "table" une poignée de cacahuètes, puis tous deux quittent les lieux jusqu'au lendemain matin. Pendant la nuit, un renard (ou chacal) vient manger les cacahuètes en piétinant la "table". Le matin, le devin revient avec son client, et interprète les traces laissées par le renard et, en fonction de celles-ci et des bâtons renversés, lui prédit l'avenir.

Il est bon de souligner que le pays dogon était devenu, jusqu'à la Guerre du Mali, la première région touristique du Mali et de l’Afrique de l’Ouest, en raison de ses attractions majeures : le caractère exceptionnel du site naturel et sa richesse culturelle.

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Querelle entre Dogons et Peuls

Le peuple Dogon a toujours vécu en harmonie avec le peuple frère peul, comme l'atteste Amadou Hampaté Bâ, apôtre de paix et éminent sage africain d'ethnie peul, fils de nobles né et élévé à Bandiagara parmi les dogons dont il connait bien la culture et s’y identifie. Il pourrait etre vu comme le plus peul de tous les dongons ou encore le plus dogon de tous les peuls. Les symboles dogons incrustés dans l’architecture de la fondation qui porte son nom à Abidjan en est un éloquent témoignage . Malheureusement, cette complicité qui faisait la beauté de la région est en train de pâlir, sous les tensions qui opposent désormais ces deux peuples frères. Amadou Hampaté Bâ doit bien se retourner dans sa tombe en voyant ses frères s’entre-déchirer. Triste!  

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