Afrique: L'alphabet N’ko, une alternative linguistique pour l’Afrique

  • Par Yaya konaté
  • 12 Sept. 2020
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L’alphabet N’ko se compose de 27 lettres reparties en 19 consonnes, 7 voyelles et une diphtongue. Il s’écrit et se lit de droite à gauche et de haut en bas.


Conscient du fait que l’Afrique méritait un système de transcription adapté à ses sonorités propres plutôt que d’en importer un comme l’alphabet latin ou l’alphabet arabe, un homme va faire tout son possible pour réaliser le projet. C’est ainsi qu’une écriture typiquement africaine voit le jour : le N’ko. Découvrons cette écriture propre à l’Afrique…

Le mythe de fondation

Cette écriture a été inventée en 1949 par Solomana Kanté, né en 1922 à Sumankoi près de Kankan, en Guinée, d’un père maitre coranique (karamoko) dont la famille était lointainement originaire de Ségou au Mali. Pour certains, les langues africaines étaient impossibles à transcrire et de plus, elles ne possédaient pas de grammaire. Piqué au vif par ce qu’il considérait être une atteinte à sa dignité d’africain, Solomana Kanté se lança, en 1945, dans une première tentative de transcription de la langue malinké avec des caractères arabes. Malgré trois années d’efforts, il n’y parvint pas. En 1948, il fit une seconde tentative avec l’alphabet latin, mais comme avec les caractères arabes, cet essai de transcription se solda par un échec. Dans les deux cas, c’est le caractère tonal de la langue malinké qui compromit l’expérience. Il fallait donc découvrir un système capable de rendre la spécificité de cette langue, et c’est ce qui amena Solomana à créer l’alphabet N’ko.

Présentation du N’ko

L’alphabet N’ko se compose de 27 lettres reparties en 19 consonnes, 7 voyelles et une diphtongue. Il s’écrit et se lit de droite à gauche et de haut en bas. Il sert à transcrire les langues mandingues et signifie à ce titre « je dis » dans la totalité des langues mandées. De type alphabétique, le N’ko a été inventé pour permettre aux africains utilisant la langue malinké de disposer d’une écriture bien à eux. Solomana estimait en effet que l’importation d’alphabets comme l’alphabet latin et l’alphabet arabe ne leur était pas adaptée. C’est ainsi qu’il a créé le N’ko afin que la langue Malinké puisse avoir une écriture qui reflétait véritablement ses besoins, ses sonorités et sa culture.

L’utilisation du N’ko

Initialement, le N’ko a d’abord été utilisé en Guinée. C’est avec le temps que cette écriture s’est étendue à d’autres pays d’Afrique occidentale qui utilisaient le malinké. De nos jours, le N’ko est employé dans des pays comme le Sénégal, le Mali et la Côte d’Ivoire. Elle réussit à survivre en dépit de la forte concurrence du français. L’écriture n’ko est ainsi une écriture particulièrement fournie. Vous en trouverez diverses publications. Certaines seront des traductions du Coran et de la Bible tandis que d’autres seront plutôt des manuels pédagogiques de sciences, de mathématiques, de philosophie…

Par ailleurs, les écrits N’ko se présentent aussi sous formes de dictionnaires, de journaux locaux et d’ouvrages de médecine traditionnelle.

L’écriture N’ko

Il est aussi bon de savoir qu’en N’ko, l’écriture va de droite à gauche. Les caractères N’ko ressemblent considérablement aux caractères de l’alphabet arabe. Le N’ko est de plus une écriture dans laquelle les lettres sont reliées entre elles. Dans l’alphabet N’ko, vous trouverez 7 voyelles ainsi que 20 consonnes ; ces dernières comportent une syllabique. Spécialement, avec l’alphabet N’ko, vous devez aussi vous attendre à rencontrer des diacritiques. Au nombre de 8, ces diacritiques ont pour but de marquer les tons.

Fort de cette invention Solomana Kanté se mit à écrire toute une série de textes en N’ko et, à sa mort, en 1987, on pouvait mettre à son actif une centaine d’ouvrages traitant aussi bien de religion (traduction du Coran et des hadiths) que d’histoire (Menden, Samori), de médecine traditionnelle que de droit. En 1986, un an avant la mort du maitre, ses disciples fondèrent, en Guinée, une association dont les objectifs étaient « de lever le défi de l’écriture en Afrique noire », d’assurer la promotion des langues et des cultures.

L’aliénation culturelle de notre continent n’est certainement pas irréversible.

 

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